Typologie(s)

sculpture et monument commémoratif

Intervenant(s)

Louis SAMAINsculpteur1869-1895

Edmond LE GRAIVEarchitecte1869-1895

Statut juridique

Inscrit à l’inventaire légal le 19 août 2024

Inventaire(s)

Ce bien présente l’(es) intérêt(s) suivant(s)

Recherches et rédaction

2005-2006

id

Urban : 15954
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Description

Sculpture en marbre de Carrare (d'après un plâtre de 1869 qui se trouve au Palais de Justice de Bruxelles), par le sculpteur Louis Samain (1834-1901). Acquise par l'État belge en 1894 et offerte à la Ville de Bruxelles, elle est placée sur l'avenue Louise en 1895. SocleMassif surélevant un support ou une statue. en pierre bleue, en octogone à pans incurvés, conçu par l'architecte E. Le Graive.

La sculpture rappelle Laocoon et ses fils (collections du Vatican), Ugolin et ses fils de Jean-Baptiste Carpeaux ou encore davantage le Milon de Crotone de Pierre Puget.
La scène représente un homme noir dénudé et enchaîné qui protège son fils contre deux chiens. Elle s'inspire du romanLe style néo-roman (à partir de 1850 environ) est une tendance architecturale mettant à l’honneur les formes inspirées du moyen-âge roman. de l’Américaine Harriet Beecher-Stowe La case de l'Oncle Tom (1851). Ce romanLe style néo-roman (à partir de 1850 environ) est une tendance architecturale mettant à l’honneur les formes inspirées du moyen-âge roman., publié neuf ans avant la guerre de Sécession, fait l’apologie d’une relation de servitude vue comme idéale: celle d’un maître blanc généreux et d’un esclave noir reconnaissant et docile. Scipion, un esclave, s’est enfui de chez ses maîtres blancs, les frères esclavagistes Alfred et Augustin St. Clare, et il est acculé par des chiens dans un marécage. Repris, Scipion entre volontairement au service d’Augustin St. Clare et se convertit au christianisme.
Le terme «marron» renvoie au marronage: la fuite, comme moyen de résistance pour les esclaves, afin d’échapper à l’esclavage dans de nombreux terrains coloniaux entre le XVIe et le XIXe siècle. L’esclave fugitif est appelé marron, nègre marron, negmarron ou cimarron.
L’ensemble sculptural figure l’extrême violence exercée contre les personnes noires. En outre, le choix de le placer dans l’avenue Louise en 1895 n’est pas anodin. À cette époque, la guerre entre l’État indépendant du Congo et les «Arabo-Swahilis» (1892-1894) vient de se terminer et Léopold II entend justifier son entreprise coloniale – non moins violente – notamment sur base d’une dénonciation et d’une lutte contre l’esclavagisme.
En 2020, les résidents du quartier ont lancé une pétition demandant le retrait de la statue de l’espace public.

Sources

Ouvrages
CLERBOIS, S., «La sculpture publique bruxelloise au XIXe siècle : ville, pouvoir, idéologie», Cahiers Bruxellois, no 1, 2023, pp. 220-222.
CMCLD, «Décolonisation de l’espace public : un débat à recentrer», Natrimoine. La revue des héritages culturels, vol. 1, no 1, novembre 2022, p. 12?17.
DEROM, P. (dir.), Les sculptures de Bruxelles, Galerie Patrick Derom – Pandora, Bruxelles – Anvers, 2000, pp. 99-100.
DEROM, P. (dir.), Les sculptures de Bruxelles. Inventaire. Catalogue raisonné, Galerie Patrick Derom, Bruxelles, 2002, p. 77.
DUQUENNE, X., L'avenue Louise à Bruxelles, Xavier Duquenne éd., Bruxelles, 2007.
Vers la décolonisation de l’espace public en Région de Bruxelles-Capitale. Cadre de réflexion et recommandations. Rapport du groupe de travail, Bruxelles, Urban.brussels, février 2022, pp. 123-124, 231.
LEWIS, N., Traces et tensions en terrain colonial. Bruxelles et la colonisation belge du Congo, Paris, Shed Publishing, 2023, p. 68-69.
LOFFMAN, R., «Le régime du caoutchouc : esclavage et travail forcé. Le Congo de Léopold II, 1885-1908», ISMARD, P. (dir.), Les Mondes de l’esclavage. Une histoire comparée, traduit par DEGACHI, S. et SHELLEBY, M., Paris, Seuil, 2021, p. 335-340.
VIDAL, C., «Résistance», ISMARD P.(dir.), Les Mondes de l’esclavage. Une histoire comparée, Paris, Seuil, 2021, p. 655-671.

Sites internet
Esclaves en fuite repris par des chiens