Recherches et rédaction

2019

 

Voir les biens de ce lieu repris à l'inventaireLa rue Brogniez est une longue artère qui relie le boulevard Poincaré au boulevard de la Révision, situé dans son prolongement. La rue croise de nombreuses artères sur son parcours, dont le square Robert Pequeur – qui articule les rues Otlet, Gheude, Lambert Crickx et Limnander –, l’avenue Clémenceau, les rues de Fiennes et de l’Instruction.

L’artère s’inscrit dans le nouveau quartier résidentiel imaginé par l’inspecteur-voyer Victor Besme pour Cureghem, dont le projet fut accepté par le Conseil communal en séance du 09.11.1863. Comprise entre la chaussée de Mons au nord-ouest, la rue de l’Instruction (à créer) au sud-ouest et la nouvelle station du Midi au sud-est, la zone fit l’objet d’un projet définitif, dressé par Besme en décembre 1871 et janvier 1872, approuvé par le Conseil communal en séance du 21.03.1872 puis par l’arrêté royal du 01.05.1872. La mise en œuvre de ce plan géométrique, centré sur la rue de Fiennes et la place du Conseil, fut confiée à la Société immobilière de Cureghem, regroupant des propriétaires de terrains de la zone, qui s’engagea à réaliser les travaux de percement, égouts et pavage endéans les cinq ans. Le projet prévoit en outre un redressement de la branche intermédiaire de la Senne, qui se raccorde désormais perpendiculairement à la rivière en coulant entre les rues de l’Instruction et Rossini.

L’ouverture de la rue Brogniez, large de dix-huit mètres, fut toutefois entamée à partir de l’actuel boulevard Poincaré dès 1864 environ, date des premières demandes de permis de bâtir dans l’artère. Dans ses premiers tronçons, elle dut enjamber, via un pont, la Coupure de la Petite Senne. Le reste de l’artère ne fut ouvert que progressivement jusqu’à la rue de l’Instruction, suite aux travaux de déplacement de la branche intermédiaire de la Senne, que la rue enjambe dans son dernier tronçon. La Coupure et la dérivation de la Senne seront toutes deux asséchées dans les années 1950.

Dans le premier îlot côté pair se trouvait, jusque dans les années 1890, l’École de Médecine vétérinaire de l’État. Relocalisé rue des Vétérinaires (voir no 45-47), l’établissement fut remplacé, en vertu de l’arrêté royal du 19.10.1909, par un nouveau quartier articulé, au carrefour de la rue Brogniez, par un square triangulaire, l’actuel square Robert Pequeur. Notons que le nom de la rue rend hommage à un professeur de l’école vétérinaire, André-Joseph Brogniez (1802-1851).

L’artère se bâtit lentement à partir de 1864 et jusqu’au début des années 1900. Les premières constructions sont pour la plupart implantées dans la partie située au nord de la rue de Fiennes. Les habitations des premières décennies sont généralement d’inspiration néoclassique, celles des années 1890-1900 le plus souvent de style éclectique. Il s’agit de larges maisons à entrée cochère – comme aux nos37 (avant 1881), 145 et 147 (avant 1881) ou 183 (vers 1900) –, de maisons bourgeoises – comme aux nos146 (après 1893), 150, 152 (années 1880) et 163 (après 1893) –, ou d’immeubles de rapport, tel le no189 (après 1893). Certaines ont été conçues en ensemble, comme les nos3 à 13 (avant 1881), sans doute jadis identiques. De nombreuses habitations s’accompagnent d’un magasin ou atelier arrière. L’artère étant un axe commerçant important, beaucoup ont été dotées, dès l’origine ou tardivement, d’un rez-de-chaussée commercial.

La rue comptait également diverses industries comme, au no44-46, juste à l’est de la Coupure de la Senne, les Établissements Gouweloos Frère & Sœur, spécialisés en chromolithographie d’art, lithographie et typographie. L’ensemble fut remplacé par une école ouvrière en 1969, devenue aujourd’hui la Maison du Protestantisme. Pointons également, à l’arrière du no 172a et au no 172b, des bâtiments de l’ancienne Fabrique de Tresses et Lacets Torley, établie dans l’îlot à partir de 1880 (voir rue de l’Instruction nos 124 à 126b).

Deux dépôts de la société Les Tramways Bruxellois étaient jadis implantés dans la rue. Le premier, conçu à partir de 1874 pour ce qui était alors la Compagnie Brésilienne de Tramways et agrandi dans les années 1890 et 1900, se développait dans l’îlot compris entre les rues Memling et Gheude, avec entrée à l’angle de cette dernière (actuel no 79a-79c). Il a été démoli après 1987. Le second fut implanté en 1887 à l’angle des rues Rossini et Grisar (actuel no 158-158a); il a disparu dans les années 1950.

À noter, au no151-157, une extension de l’Institut Notre-Dame, implanté dans l’îlot à partir de 1905 (voir rue de Fiennes no 66); elle résulte de la transformation d’une maison et d’un bâtiment industriel (architecte F. Buelens, 1969).

Sources

Archives
ACA/Urb. Registre des rues.
ACA/Urb. 44-46: 43589 (02.04.1969); 79a-79c: 642 (07.05.1874), 1527 (1894), 8927 (13.06.1902); 151-157: 43567 (16.01.1969); 158-158a: 3882 (30.11.1887); 183: 9206 (ca 1900).
AVB/PP 2879 (vers 1865).

Ouvrages
CULOT, M. [dir.], Anderlecht 1. Inventaire visuel de l'architecture industrielle à Bruxelles, AAM, Bruxelles, 1980, fiches 19, 94.
VAN AUDENHOVE, J., Anderlecht au fil des siècles, Anderlechtensia-C.A.F.H.A, 1996, pp. 193-194.
VAN AUDENHOVE, J., Les rues d’Anderlecht, Commémoration du vingtième anniversaire de la fondation d’Anderlechtensia, C.A.F.H.A, 1995, p. 53.
VAN DEN BERGHE, G., Anderlecht door de eeuwen heen, Geschied- en Oudheidkundige kring van Westbrabant, Bruxelles, 1938, pp. 206-207.

Périodiques
Almanach du Commerce et de l’Industrie, «Brogniez (rue)», 1868.

Cartes / plans
BESME, V., Plan d’ensemble du Quartier de Cureghem, 01.12.1871 et 30.01.1872.
Bruxelles et ses environs, Institut cartographique militaire, 1881.
Bruxelles et ses environs, Institut cartographique militaire, 1893.